Bonheur

L’écriture est un viol silencieux. Les idées se couchent et la main les exécute sur le papier sans ménagement. La pureté se sent alors ternir et pénétrée d’une immaculée noirceur dont le foutre de rêve vient s’appesantir sur cette étendue vierge de tout soupçon. Le trait phallique verse son sang pour donner naissance à une rumeur et prendre racine sur un espoir sans lendemain. Et parce qu’il persiste sur cette blancheur, il y fait corps et trouve à l’improviste son bonheur.
Il faut se rendre quitte envers la vie avant qu’elle ne nous quitte.
Nous devons affranchir nos vies de sa dette, coûte que coûte.
Il nous faut voyager tant qu’il est encore temps
Respirer les senteurs des bois
Trouver d’autres endroits
S’éloigner du familier
Quitter provisoirement son toit
Pour mieux le retrouver en soi
Plonger dans l’inconnu
Apprivoiser la brume
Ignorer l’amertume
Se faire léger comme la plume
Ou pareille à la feuille au vent
Se laisser porter par la providence
Se faire vacuité
Et penser que tout va bien se passer
Partir au loin par delà les montagnes
Longer de nos pas les ruisseaux chantant
Marcher quelque part sans savoir où se rendre
Regarder le cœur en avant
Avancer sans peur au ventre
Rencontrer cet autre que l’on appelle étranger
Nouer la douce fraternité d’un jour partagé
Et repartir en paix et signer notre liberté
Le marcheur s’invente
Il passe son chemin
Et le crée
Comme un destin
Il nous faut voyager tant qu’il est encore temps
Secouer nos vies de leurs ruines
Nous allier à nos espoirs pour être plus fort
Devenir plus céleste qu’un songe égaré
L’arbre pousse sans bruits
Le vent le réveille en secouant ses ornements
Le sable s’élève pour retomber ailleurs
Et former une dune patiemment
Ciel nuageux
La pluie s’impose à son heure
Le sol s’engorge par endroits
Ou ruissèle de son imperméabilité
Les pas se succèdent au fil des aubes
Et les nuits bercent la balade de ce rêveur éveillé
Il nous faut voyager tant qu’il est encore temps
Persuader le moment de son intensité
Lui murmurer notre fidélité
Et tenir promesse.
Charon n’était pas bon marché. Non seulement, il fallait pousser pour faire avancer le véhicule, mais pour finir, il n’en descendait même pas pour porter vos bagages.