De nos jours, qui cueille encore les fleurs à part l’enfant et le poète ?

1. J’ai beaucoup de mal à supporter les gens qui me disent bonjour en regardant ailleurs. C’est un peu comme s’ils mélangeaient égard et indifférence. Ils sont là et n’y sont déjà plus. Devant vous, ils cèdent la politesse à un ailleurs. Ce rituel mécanique a le don de m’exaspérer car cette marque d’intérêt insultante renouvelle à elle seule l’impression d’en dire long sur la piètre estime dont je suis l’objet.
Recueil limité
Il est heureux dans la vie d’un homme de connaître un endroit où il puisse se recueillir, s’éloigner du tumulte des relations pour goûter au silence de ses propres retrouvailles. Seul, il peut jeter le masque que lui impose la vie moderne et revenir à lui. Malheureusement, ces lieux ne peuvent souffrir d’une trop grande familiarité, car dès son retour ce dernier ne peut que constater l’écart accru entre ses aspirations et ce qu’il ampute de lui-même.
J’ai reçu un appel de l’autre bout du monde pour me parler de mon téléphone. Cela arrive fréquemment. Depuis quelques années ce dernier a acquis une existence autonome. Et ces gens qui me contactent tiennent absolument à me parler de lui : comment se porte-t-il ? Est-il en pleine possession de ses moyens ? Ne devrait-il pas prendre une retraite anticipée ?
Et lorsque je regarde autour de moi, je vois d’autres gens qui parlent à leur téléphone et cela quel que soit l’endroit, l’heure ou le temps qu’il fait. Que notre monde a changé ! Autrefois, parler tout seul était considéré comme un signe d’aliénation. A l’heure du numérique et autres gadgets, c’est devenu un signe d’intégration.
« Tricher est une preuve de solidarité. Le tricheur fait appel aux autres alors que l’homme honnête ne croit égoïstement qu’en lui-même. »
« Donner un conseil est la chose la plus sournoise que je connaisse. C’est convaincre l’autre du coût de notre engagement sans avoir à en payer le prix. »
« Il faut se méfier des problèmes des autres. Tôt ou tard, ils finissent par devenir les vôtres. »
« Avoir des scrupules est la façon la moins économique de vivre en société. »
Pensée parasite
« A trop vouloir combattre quelque chose, on finit par lui donner de l’importance. Avec nous, il grandit et prend une place encombrante à la manière d’un parasite que notre ferveur alimente. »
« Il est stupéfiant de constater avec quelle facilité l’homme est capable de mentir pour éviter un moment de solitude. Sa seule imminence suffit à le convaincre et à lui donner l’élan nécessaire pour s’en éloigner. Et, avec l’habitude, cet exercice de style devient une seconde respiration qui s’actualise en fonction du sens pris par le vent. »